LOMBALGIES... DORSALGIES... CACAPHONIES MÉDICALES !...*

Par Michel MARIGNAN

Peut-être que ce que je vais dire va en choquer certains, auxquels cas je serais intéressé à ce qu'ils s'expriment.

Depuis 30 ans que je pratique la posturologie dans le cadre des douleurs vertébrales en cabinet de médecine générale, je peux maintenant affirmer que:

- La douleur vertébrale est comme un iceberg, ce que l'on voit émerger n'est qu'une petite partie du problème,
- La douleur vertébrale est un symptôme, ce n'est pas la douleur que l'on doit traiter mais ce qui la provoque,
- Les anti-inflammatoires sont contre-indiqués en cas de douleur vertébrale, car la réaction inflammatoire est une réaction de défense,
- Les décontracturants musculaires sont à utiliser avec prudence dans les "blocages vertébraux", car il restaurent une liberté de mouvement dont la réduction est une manoueuvre de défense réflexe, et leur libération fait le lit de la hernie discale,
- Les antalgiques sont à utiliser "juste ce qui est nécessaire", car la douleur est un excellent facteur de mise en jeu des réactions de défense,
- La hernie discale est dans la très grande majorité des cas un accident mécanique sur un rachis en dysfonctionnement mécanique, souvent depuis des années,
- Le dysfonctionnement mécanique d'un rachis prend ses sources le plus souvent dans des asymétries de tonus musculaire, et non dans des asymétries de mouvement (qui donc a "inventé" le "faux mouvement", comme s'il y avait des "vrais" et des "faux" mouvements, pour moi il n'y a que des mouvements),
- La restauration des asymétries du tonus est l'apanage du traitement postural.
- La douleur radiculaire est la conséquence d'une hernie discale, et que supprimer la hernie n'est pas supprimer ce qui l'a provoquée (le patient se relève de son lit à l'hôpital et reconstitue une nouvelle hernie discale, ce n'est pas rare !),
- Chercher à guérir est quand même mieux que chercher à soulager, mais c'est plus long et plus compliqué (hélas pour les posturologues),
- Il n'existe aucune recette ni panacée, tout malade est un cas particulier.

Discussion avec Alain:

Bonjour, Alain,
     Je réponds à votre mail entre les lignes.
    Les anti-inflammatoires sont contre-indiqués en cas de douleur vertébrale, car la réaction inflammatoire est une réaction de défense, Je pense que dans la douleur vertébrale il y a toujours une composante inflammatoire doublée d'une composante mécanique posturale. Bien sur la réaction inflammatoire est une réaction de défense et la mise en oeuvre d'un processus de cicatrisation mais je préconise les anti-inflammatoires lorsque le patient ne dispose pas de position de repos mécanique ou de non douleur (douleur permanente même allongé, impossibilité de dormir, position debout impossible) c'est à dire quand la composante inflammatoire est la plus importante. De plus je pense que dans les cas de sciatique vraie où la racine est oedèmatiée les anti-inflammatoires peuvent agir sur le processus de drainage et soulager l'irritation locale. Souvent un traitement court peut être suffisant pour traiter la composante mécanique
    Si les anti-inflammatoires étaient la solution à la guérison des douleurs vertébrales non symptomatiques, tu aurais parfaitement raison. Mais le problème est bien de ne pas transformer une douleur vertébrale en douleur radiculaire (à cause de l'implication chirurgicale sous-tendue), et si tu interroges bien tes patients, tu verras que plus ils utilisent les AINS plus la transformation en hernie discale est fréquente. Dans les cas que tu évoques, où la composante inflammatoire est majeure (douleur nocturne vers 4 h du matin), il faut rechercher autre chose, une vraie pathologie inflammatoire, telle qu'un spondylarthrite ankylosante par exemple. Dans la pathologie mécanique, on sait que les anti-inflammatoires (AINS) soulagent parfois, mais c'est l'avenir de la colonne qu'il faut regarder, pas la douleur dans l'immédiat. L'adhésion du patient à une stratégie de guérison plus que de soulagement demande, bien entendu, du temps d'explication. A chaque fois que, dans le passé, j'ai eu des problèmes de traitement, les AINS n'ont soit rien fait, soit aggravé le patient quand je m'y suis résolu, pensant que j'avais tord.
    Je ne vois que des pathologies vertébrales (95%), je ne prescrit pas d'AINS, ni antalgiques, ni aucun médicament en fait (rien cette année en 2008, je pense rien, 0, en 2007). Les cas d'échec, dans ma clientèle, du traitement postural se chiffrent à une dizaine cette année, ce sont tous des syndromes manducateurs.
    Les décontracturants musculaires sont à utiliser avec prudence dans les "blocages vertébraux", car il restaurent une liberté de mouvement dont la réduction est une manoueuvre de défense réflexe, et leur libération fait le lit de la hernie discale,
    Les antalgiques sont à utiliser "juste ce qui est nécessaire", car la douleur est un excellent facteur de mise en jeu des réactions de défense,Je les préconise dans la situation où le patient n'a pas suffisamment de position de non douleur. C'est une erreur à mon avis, mais la position du médecin et du podologue ne sont pas les mêmes.
    La hernie discale est dans la très grande majorité des cas un accident mécanique sur un rachis en dysfonctionnement mécanique, souvent depuis des années, Bien sur en tenant compte aussi de l'hérédité en terme de qualité discale "génétique"… Sincèrement, tu y crois ?
    Le dysfonctionnement mécanique d'un rachis prend ses sources le plus souvent dans des asymétries de tonus musculaire, et non dans des asymétries de mouvement (qui donc a "inventé" le "faux mouvement", comme s'il y avait des "vrais" et des "faux" mouvements, pour moi il n'y a que des mouvements), Tout à fait d'accord en ajoutant les postures extrêmes maintenues ou les efforts qui dépassent les résistances tissulaires ( muscles, disque, ligaments...) Je suis toujours aussi mal à l'aise avec le mot posture utilisé à la place de position. Pour moi, posture ne peut être au pluriel.
    La restauration des asymétries du tonus est l'apanage du traitement postural.Oui
    La douleur radiculaire est la conséquence d'une hernie discale,oui et il n'y a pas de sciatique sans irritation radiculaire dû le + souvent à une cause discale et que supprimer la hernie n'est pas supprimer ce qui l'a provoquée (le patient se relève de son lit à l'hôpital et reconstitue une nouvelle hernie discale, ce n'est pas rare !), Oui et pour moi le traitement postural ne suffit pas. En fait, sur ce point je ne sais pas, car je fais toujours un traitement par auriculothérapie, y compris sur le contrôle postural, et c'est magique !
    Chercher à guérir est quand même mieux que chercher à soulager, mais c'est plus long et plus compliqué (hélas pour les posturologues),
Il n'existe aucune recette ni panacée, tout malade est un cas particulier.C'est tout à fait vrai et les facteurs sociaux, professionnels et psycho-affectifs des rachialgiques chroniques sont la pour nous le rappeller.

* C'est Pierre-Marie GAGEY qui a donné ce titre provocateur pour attirer l'attention sur cet excellent texte de Michel MARIGNAN