La «Prisma-thérapie» testée sur 160 patients souffrant d'un syndrome de Ménière

G.P. UTERMÖHLEN

Traduit du Néerlandais par soeur Maria

FIG.1 — Photocopie du titre de l'article dans la Revue N.T.V.G. du samedi 11 Janvier 1947

     Le titre est dans la même police, le même corps, le même alignement que tous les textes de la revue, seule apparaît dans la marge la mention: «Utermöhlen, De prismatherapie»

     La revue a été retrouvée dans les sous-sols de la faculté de Médecine de Maastricht, grâce au docteur R. PIGASSOU-ALBOUY et la coopération de sœur Maria.

[UTERMÖHLEN G.P. — De prismatherapie getoest aan 160 lijders aan het syndroom van Ménière. Nerder. Tijdscher. v. Geneesk., 91, 124-126, 1947.]

     Depuis la première publication dans la N.T.V.G. en 1941, le nombre de patients souffrant de la maladie de Ménière auxquels cette thérapie pratiquée par l'auteur a été proposée a augmenté de 23, en plus des 160, actuellement nous en sommes à 196. Les malades sont originaires de différentes régions du pays et, pour une grande partie, se sont confiés à ce traitement sur les conseils de confrères intéressés.
     Il est souhaitable de parler de "prisma-dioptries" en fonction de sa relation avec la décentration, ainsi on n'a pas besoin de se soucier de la sorte de verres.
     Nous essayerons de répondre à la question: de quelle manière arrivera-t-on, sans perdre du temps et avec les moyens les plus simples, à un résultat? Est-ce que ceux qui ne possèdent pas les moyens, l'assistance et le partage du travail qu'une clinique peut offrir, peuvent y arriver? Là où l'on ne peut arriver à un diagnostic sûr, il est indispensable de se référer à une clinique qui possède l'expérience. Il arrive que l'on confonde causes et effets. On considère le patient(e) avec des symptômes de Ménière comme un(e) malade nerveux(se), mais en regardant de près on s'aperçoit que c'est une maladie de Ménière qui, par crainte d'avoir à nouveau une attaque, et par son continuel ou intermittent sentiment d'insécurité, dans la rue et à la maison, est devenu nerveux. On le considère souvent comme un simulateur ou un sursimulateur, parce qu'il est "par ailleurs" en bonne santé. Mais il ne supporte pas la radio ou des bruits forts, les cris des enfants; puis il craint de perdre son travail. Il a perdu sa confiance dans l'avenir. Il est souhaitable de maintenir le nom de Ménière, au besoin en y ajoutant, comme un éclaircissement, "Dystonie labyrinthique neurovégétative". L'effet prisme n'a des résultats que lorsqu'il s'agit de nystagmus horizontal, ou que celui-ci est à éveiller, parfois combiné avec des nystagmus rotatoires. Quand le nystagmus observé de manière habituelle n'est plus aperçu, il semble, puisque le patient est capable d'apercevoir le mouvement de va-et-vient d'un point fixe, qu'il existe malgré tout un nystagmus minimal.
     L'anamnèse doit être examinée d'une façon étendue. On apprend ainsi des plaintes spéciales en plus des plaintes stéréotypées; on entend parler d'hallucinations visuelles, de voir des flammes, de difficultés à ouvrir les yeux qui surviennent en attaques nocturnes pendant lesquelles le patient doit soulever la paupière supérieure (Oblongata centrum; cilio-spinal; nuque sympaticus, musculus tarsalis?), des symptômes allergiques, des crises d'asthme surviennent après avoir éternué, s'être mouché fort (trop fort), avoir utilisé une douche chaude ou froide sur la tête, ne pas supporter la lumière solaire ou des rayons solaires tombant directement sur la tête. Tous ces symptômes accompagnent le facteur nystagmique.
     L’examen commence par l’examen des yeux : vision, réfraction, fond d’œil, éventuelle hétérophorie pour la détermination de la puissance du prisme (plus fort chez les ésophoriques, moins fort chez les exophoriques). Qu’il y ait ou non une hétérophorie n’a aucune importance pour la détermination de la position du prisme : la base du prisme doit toujours être nasale ; quand on inverse cette position, c’est-à-dire lorsqu’on met le prisme en base temporale, alors les symptômes s’aggravent au lieu de disparaître ou d’être améliorés.
     L’examen auditif se fait de la manière ordinaire. L’oreille atteinte semble avoir un effet tonique sur l’œil du même côté.
     Il faut recherche le signe de Romberg, éventuellement avec un fil à plomb. Il faut chercher les réflexes pour éliminer la possibilité d’une sclérose en plaque ; on doit penser aussi au neurinome de l’acoustique. Après cette examen clinique on pratiquera les épreuves vestibulaires. On peut d’une façon très simple, réveiller le nystagmus et les autres signes du Ménière, il suffit de demander au patient de tourner sur lui-même, autour de son axe vertical, d’abord à droite comme les aiguilles d’une horloge, puis à gauche. Une rotation dure de trois à quatre secondes. On laisse le sujet tourner de une à quatre fois de suite. A la fin d’une série de rotation, l met en marche un chronomètre que l’on arrête lorsque le patient — préalablement instruit — dira : "Tout s’arrête dehors, ne bouge plus.". Quand disparaît le nystagmus induit par les rotations, c’est-à-dire par l’arrêt subit, le patient peut parfois quand même percevoir des mouvements ‘latéraux’ de son entourage. On peut faire tourner le patient yeux ouverts ou fermés. Parfois on est obligé de le laisser tourner jusqu’à cinq fois, exceptionnellement la réaction est encore plus lente à s’établir et l’on n’obtient le nystagmus et les troubles visuels qu’après un sixième tour.
     Et maintenant arrive le moment passionnant. Sur le lunettes d’essai, on place des prismes d’une demi-dioptrie, en base nasale des deux côtés. Après avoir tourné sur lui-même deux, quatre ou cinq fois, le patient met les lunettes d’essai et constate que l’entourage "ne bouge plus", il s’arrête presque immédiatement de tourner. Le patient peut se baisser sans difficultés, il peut aussi regarder en haut, en arrière, tourner les yeux brusquement à droite et à gauche, tout étonné de pouvoir le faire, il ne peut s’imaginer que "cela puisse lui arriver". S’il semble que le patient soir encore mieux subjectivement avec des prismes d’une dioptrie et demie des deux côtés, alors on choisit cette puissance. Pareillement s’il dit être mieux avec des prismes d’une dioptrie des deux côtés. Il peut arriver qu’on place deux dioptries sur un œil, une dioptrie sur l’autre. Si, pour une cause ou une autre, surviennent encore des attaques de vertiges, on peut augmenter la puissance du prisme d’une demi-dioptrie, pour arrêter l’attaque. Il faut essayer de découvrir la cause par les données communiquées sous la rubrique : facteurs nystagmophores [NdT. Milles excuses pour ce passage que nous ne comprenons pas].
     Il est tout à fait étonnant de constater que lorsque le patient porte ces verres prismés, son hypersensibilité aux bruits disparaît, pour reparaître lorsqu’il enlève ses lunettes.
     Lorsqu’on demande au patient de marcher en avant et en arrière, yeux ouverts et avec ces lunettes, il revient exactement au point de départ, tandis qu’il dévie nettement à droite ou à gauche, lorsqu’il n’a pas ces lunettes.
     Après mensuration de la distance interpupillaire, on prescrit les verres. Chez les emmétropes, on ne prescrit que des verres prismatiques. Chez les hypermétropes, les myopes ou les astigmates, on obtient l’effet prismatique par une décentration, vers l’extérieur ou l’intérieur selon la formule que chaque opticien connaît. Avec une monture d’essai portant les verres adaptés à la vision du sujet, l’opticien décentre immédiatement, autant qu’il doit, selon la formule connue, pour obtenir par exemple une demi ou une dioptrie d’effet prismatique. Chez les hypermétropes, les verres correcteurs doivent être décentrés en les rapprochant, chez les myopes en les écartant. On peut de cette façon arriver empiriquement à des décentrements d’un tiers de dioptrie pour les deux yeux, mais ceci n’a qu’un intérêt théorique.
     Le nombre d’hommes et de femmes qui ont été traités est à peu près semblable. L’âge de début de la maladie est le plus souvent entre 40 et50 ans. Chez quelques patients les plaintes existaient depuis plusieurs années : un à deux ans pour la plupart, quatre ou cinq ans n’est pas rare, douze, quatorze, dix-huit et même vingt et un ans, c’est arrivé une fois. Il y a quelques années une enquête sur le suivi du traitement auprès des 50 premiers malades traités par les prismes a montré que le résultat est resté bon. Pour les patient traités ultérieurement (pendant les dernières années de la guerre et surtout après la libération du fait de l’amélioration des transports) le résultat est resté bon. Quelques-uns, surtout des femmes, ont eu encore quelques attaques, mais elles n’aimaient pas se passer de leurs lunettes. Elles sont probablement retournées trop vite au travail. Ce sont là des exceptions.
Conclusions
     Il est rationnel de préférer un traitement optique à une opération.
La convergence est soulagée par le port continuel des prismes en base nasale, ce qui est un facteur anti-nystagmique important, capable de lutter contre les symptômes de la maladie de Ménière. Mais le nystagmus doit être horizontal, ou au moins avoir une composante horizontale dans les cas de nystagmus rotatoire.
     Si l’acuité visuelle d’un œil est pratiquement nulle alors que l’autre œil est totalement ou relativement fonctionnel l’effet prismatique est toujours encore d’une grande valeur, sur la base de la simultanéité et d’intensité semblable stimulant la convergence [NdT : Pardon ! mais on ne comprend pas ce passage].
     La puissance des prismes varie entre une demi et une dioptrie et demie. Ce sont des verres qu’on ne trouve pas dans les boîtes d’essai, car on pensait pouvoir négliger des puissances si peu importantes. C’est par hasard que j’ai eu sous la main un prisme d’une demi-dioptrie pour ma première patiente, ce prisme placé d’une manière spéciale a eu cet effet merveilleux. C’était pour résoudre ses problèmes de convergence que j’ai essayé le prisme en base nasale. Lorsque j’ai mis le prisme en base temporale, pour voir, alors les symptômes de la malade se sont aggravés. Et depuis j’ai toujours observé la même chose dans les autres cas. Je n’ai pas d’autre explication que celle que j’ai donnée dans les N.T.V.G. de 1941.
Discussion
M. KOSTELYK demande : "Est-ce que, chez une personne en bonne santé, une position fautive des verres correcteurs induisant un effet prismatique peut provoquer un vertige ? Un de mes collègues a eu deux fois des vertiges qu’il rapportait à un effet prismatique dû à une position fautive de ses verres correcteurs.

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